Récade Fon du Bénin

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Récade Fon du Bénin

Ref : ao-45

Description

  • Length : 41 cm

Récade Fon du bénin. Pièce ancienne années 30. Pièce sur socle.

Au cours des danses et manifestations festives dans la région d'Abomey, il n'est pas rare de voir les responsables de groupe esquisser des pas de danse en tenant accroché à leur épaule un bâton ; il tient tout seul en équilibre quand ils marchent et leur permet de ponctuer les principaux moments du rythme lorsqu'ils dansent. Ce bâton, c'est la récade. Le mot viendrait du portugais et signifierait "envoyé" ; les rois avaient l'habitude de les utiliser pour authentifier leurs messages et on n'a pas tort de penser que la récade est comme une carte de visite. L'histoire a voulu que la récade se distingue de nombreux autres bâtons (kpo) qui existent chez les fon ; au nombre de ceux-ci on compte la massue ou kpota dont la fonction première est d'assommer un animal à la chasse mais aussi en cas de besoin un prince dont le sang ne doit pas couler. Les fon connaissent aussi la canne ou kpoguè devenu un bâton très important à la cour où il sert à soutenir la marche ; les cannes de marche des princes héritiers avant leur accession au trône en sont des variantes ; celle de Ghézo, aligokpo est la plus célèbre de toutes. Les grands dignitaires de culte disposent aussi de divers bâtons qui leur permettent de maintenir au sol le cou de l'animal destiné au sacrifice ou de s'accouder lorsqu'ils doivent rester debout pendant longtemps. On connaît aussi à Abomey le bâton courbe des joueurs de tambours ou aglokpo. La particularité de la récade vient sans doute du lien particulier qu'elle a tissé avec l'histoire du peuple fon et qui lui fait porter avec honneur son vrai nom : makpo ou "bâton de la rage".

Un peu d'histoire : du manche de houe à l'instrument de parade des Agassouvi

Comment en est-on venu à dénommer la récade "makpo" ? Les sources orales d'Abomey consignées dans l'ouvrage de Alexandre ADANDE (1962) affirment que lors d'une échauffourée avec des ennemis, les "Houegbadjavi" ou "Agassouvi" surpris aux champs, durent combattre leurs ennemis en utilisant des manches de houe. Pour célébrer leur victoire et faire connaître leur bravoure à d'autres rivaux, ils transformèrent l'instrument de la bataille en un objet de parade qu'ils prirent l'habitude d'accrocher à l'épaule. Au fil du temps, l'objet subira de nombreuses transformations au point de ne plus évoquer que de façon lointaine l'instrument aratoire qui lui a donné naissance. Pour le fon d'aujourd'hui, une récade est une synthèse de l'humain et de l'animal : elle a une tête, des yeux, une bouche, une gorge mais aussi une crinière. C'est bien un attribut qui convient bien aux Agassouvi dont l'ancêtre est la panthère. Alexandre Adandé (1962:14) qui n'ignore pas le récit de la transformation du manche de houe en objet de parade pense qu'il est possible que la récade provienne aussi de l'arme de guerre utilisée sous le règne de Houegbadja (1645-1685), "un bâton légèrement recourbé, à l'une de ses extrémités enflée et garnie d'un anneau de fer".

De beaux bâtons à message

La volonté des artistes de cour de ne pas laisser se perdre les propos de leurs rois, l'obligation qui leur en était peut-être faite, les a conduits à faire de la récade un objet qui "parle" et livre des messages. Ceux-ci la plupart du temps sont "transcrits" dans la lame de l'objet tandis qu'il ne perd pas pour autant les constantes de sa forme. Comme pour les autres objets de cour, les dictons retranscrits ici rappellent la force des rois du Danhomè, leur capacité et leur détermination à vaincre leurs ennemis.

Les récades rappellent aussi les noms forts des souverains, les armes autres que les récades qu'ils ont utilisées pour parvenir à leurs fins ; elles racontent aussi, grâce à des éléments pris dans différents règnes, l'intimité qui pouvait exister chez les fon entre la nature et la culture ; on voit sur les récades le défilé de la plupart des animaux connus et dont les moeurs n'étaient pas étrangères aux fon. Il n'est étrange que les rois se soient souvent identifiés à ces animaux ou à d'autres éléments de la nature représentés sur les récades.

Les arts de cour de l'ancien royaume du Danhomè demandent sans doute une initiation élémentaire aux principes de la langue et de la culture pour pouvoir être compris entièrement. Aujourd'hui, certains des proverbes ou dictons qu'ils illustrent échappent aux capacités de décodage de beaucoup de spécialistes de la cour. Il s'agit probablement d'une déperdition du savoir qu'il convient de réparer vite si nous tenons à garder à cette prestigieuse culture ce qui en a fait la force depuis de nombreux siècles.

Fonctions de la récade

Les récades sont des objets spécifiques aux rois du Danhomè. Elles y ont eu de nombreuses fonctions. Elles ont d'abord été l'insigne du pouvoir royal et plus rarement de ceux qui le partagent, princes, dignitaires politiques et religieux par exemple. On ne pouvait porter une récade que sur autorisation du roi. Ce dernier pouvait se faire représenter par quelqu'un qui portait une récade, authentifiant ainsi un message reçu. La récade représentait ainsi le roi lui-même et des textes de voyageurs confirmés par des témoignages oraux affirment que lorsque le porteur de récade présentait la pièce, on devait manifester alors les mêmes signes de respect que si on était devant la personne physique du roi : on se prosternait et on épandait un peu de poussière sur son corps. Toutes ces fonctions ont rapidement poussé dans l'ombre la fonction première de la récade, celle d'avoir été aussi un instrument de combat.

La récade aujourd'hui

Aujourd'hui, on peut se procurer une récade sans attendre une autorisation royale. L'objet s'est comme popularisé ; mais on ne le retrouve pleinement utilisé que chez les fon, véritables héritiers de la culture des rois du Danhomè. Elle fait partie aujourd'hui de l'habillement des responsables de groupes de danses traditionnelles et continue de traduire l'appartenance aux sphères du pouvoir traditionnel encore représenté par des princes qui perpétuent le passé.

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